La Banque du Canada maintient son taux directeur inchangé à 2,75 % dans son annonce de juillet 2025
L’ambiguïté entourant le commerce mondial pousse la Banque du Canada à rester sur les lignes de côté, ce qui signifie peu de répit en matière de taux d’intérêt pour les emprunteurs.
La banque centrale a décidé, dans son annonce du 30 juillet, de maintenir pour une troisième fois consécutive son taux cible du financement à un jour – qui sert de référence pour les prêts – à 2,75 %, soit le niveau où il se situe depuis mars. En conséquence, le taux préférentiel utilisé par les prêteurs canadiens restera à 4,95 %. Les taux hypothécaires variables, qui sont fixés à un pourcentage au-dessus ou en dessous du taux préférentiel, resteront eux aussi inchangés.
L’absence de changement de la Banque ne surprend pas les économistes; le maintien des taux était attendu après la publication de chiffres de l’inflation en juin meilleurs que prévu. Il s’agit d’un facteur clé pour la Banque du Canada lorsqu’elle établit sa stratégie en matière de taux, puisqu’elle utilise son taux de financement à un jour comme levier pour contrôler l’inflation : elle augmente les taux quand l’inflation est trop élevée et les réduit lorsque l’économie a besoin d’être stimulée.
« Dans ce contexte où l’incertitude reste élevée, où l’économie canadienne montre une certaine résilience et où des pressions sur l’inflation sous-jacente subsistent, le Conseil de direction a décidé de laisser le taux directeur inchangé », peut-on lire dans le communiqué de presse accompagnant la décision de la Banque.
La Banque du Canada a souligné à quel point les perspectives économiques demeurent incertaines, tout en affirmant qu’elle est prête à réagir à tout impact économique, y compris en réduisant les taux.
« Nous continuerons d’analyser l’évolution et la force des pressions sur l’inflation – celles à la baisse dues à l’affaiblissement de l’économie et celles à la hausse découlant de la montée des coûts attribuable aux droits de douane et à la réorganisation du commerce, indique le communiqué. Si l’affaiblissement de l’économie fait peser des pressions à la baisse supplémentaires sur l’inflation et que les pressions à la hausse sur les prix dues aux perturbations commerciales sont contenues, une réduction du taux directeur pourrait être nécessaire. »
Dans l’ensemble, la Banque prévoit que l’inflation demeurera proche de sa cible de 2 % jusqu’en 2027, mais elle demeure vulnérable à tout effet haussier que les droits de douane pourraient avoir sur les prix à la consommation.
De nouvelles baisses de taux sont-elles à prévoir?
Dans l’état actuel des choses, la Banque a peu de raisons de stimuler davantage l’économie par une baisse des taux. Même si les menaces tarifaires demeurent une préoccupation majeure, un sondage mené par la Banque du Canada au deuxième trimestre a révélé que les entreprises résistent mieux que prévu à la guerre commerciale, « les scénarios les plus pessimistes envisagés par les entreprises le trimestre précédent étant maintenant jugés moins probables ». Un sondage similaire mené auprès des consommateurs a montré que, bien que les ménages fassent preuve de prudence et craignent de perdre leur emploi, leurs attentes en matière d’inflation commencent à diminuer.
Le marché du travail a lui aussi montré des signes de résilience, le rapport sur l’emploi de juin affichant la première hausse depuis janvier.
Cela dit, des signes de faiblesse commencent à apparaître, le PIB du Canada ayant reculé en avril et devant probablement reculer de nouveau en mai. Les secteurs directement touchés par les droits de douane – notamment l’automobile et la fabrication – ont enregistré des baisses de leur main-d’œuvre.
La Banque a réagi à ces préoccupations dans ses nouvelles perspectives, selon lesquelles elle s’attend à une contraction du PIB au deuxième trimestre, suivie d’un rebond à 1 % pour le reste de 2025, puis d’une croissance de 2 % d’ici la fin de 2027 – une amélioration par rapport à ses prévisions antérieures, qui tablaient sur une croissance de 1,6 % d’ici la fin de cette période.
« Le Conseil procède avec prudence, en portant une attention particulière aux risques et aux incertitudes auxquels l’économie canadienne est confrontée, précise le communiqué, notamment : dans quelle mesure les droits de douane américains plus élevés font baisser la demande pour les exportations canadiennes; à quel point cela a une incidence sur les investissements des entreprises, l’emploi et les dépenses des ménages; avec quelle ampleur et à quelle vitesse les hausses de coûts découlant des droits de douane et des perturbations commerciales sont répercutées sur les prix à la consommation; et comment évoluent les attentes d’inflation. »
En phase avec la politique tarifaire américaine
La Banque du Canada pourrait également être influencée par l’évolution des taux d’intérêt aux États-Unis. Sa contrepartie américaine, la Réserve fédérale, a elle aussi maintenu son taux directeur inchangé, l’inflation et l’emploi ayant dépassé les attentes aux États-Unis, ce qui écarte toute justification d’une baisse de taux. Bien que le président Donald Trump ait fait pression pour une baisse, il semble peu probable que la Fed modifie sa politique à court terme, y compris dans sa propre annonce prévue aujourd’hui à 14 h (HE).
De manière générale, les banques centrales canadienne et américaine harmonisent leurs politiques de taux, puisqu’un écart trop important entre les deux pourrait entraîner une dépréciation du dollar canadien – ce qui serait en soi inflationniste. Si l’économie canadienne demeure le principal facteur dans la fixation des taux par la Banque du Canada, le maintien du statu quo par la Fed lui offre une plus grande marge de manœuvre pour faire de même.
Qu’est-ce que cela signifie pour les emprunteurs hypothécaires?
Emprunteurs hypothécaires à taux variable
Le maintien des taux annoncé aujourd’hui signifie que rien ne changera pour les détenteurs d’hypothèques à taux variable; leurs versements mensuels, ainsi que la part affectée aux intérêts, resteront inchangés. Les taux hypothécaires variables resteront également stables pour l’instant, le taux variable à cinq ans le plus bas au Canada se situant actuellement à 3,95 %.
Toutefois, les emprunteurs à taux variable ont déjà bénéficié d’un allègement important au cours de la dernière année. Ce nouveau cycle de maintien des taux fait suite à une série de sept baisses entre juin 2024 et mars dernier, qui ont globalement ramené le taux de financement à un jour de 225 points de base par rapport à son sommet de 5 %.
Emprunteurs hypothécaires à taux fixe
Les annonces de taux de la Banque du Canada n’ont pas d’incidence directe sur les taux hypothécaires fixes, mais elles peuvent influencer les rendements obligataires, que les prêteurs utilisent pour établir ces taux. En général, les rendements obligataires baissent lorsque les investisseurs s’attendent à une baisse de l’inflation et à une économie stable, mais ce n’est clairement pas le cas en ce moment. La volatilité persistante entourant la guerre commerciale lancée par Trump a maintenu les rendements à un niveau élevé, tant au Canada qu’aux États-Unis. Le rendement des obligations du gouvernement canadien à cinq ans n’est pas descendu sous la barre des 2,8 % depuis la mi-mai, et se maintient au-dessus de 3 % depuis le 11 juillet. Les préoccupations liées à l’absence d’un accord commercial entre le Canada et les États-Unis ont fait grimper ce rendement à 3,13 % le 15 juillet, son plus haut niveau en six mois.
Cette récente hausse a poussé les prêteurs à augmenter leurs taux hypothécaires fixes, le taux fixe sur cinq ans le plus bas au Canada s’établissant désormais à 3,89 %. D’autres hausses sont à prévoir si de nouvelles surprises liées au commerce font grimper les rendements obligataires.
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Quelle sera l’incidence du taux actuel sur le marché immobilier?
Le marché immobilier canadien a connu un printemps morose, les acheteurs potentiels préférant attendre que la volatilité entourant les droits de douane et les craintes économiques s’atténuent. Toutefois, les plus récentes données nationales pour le mois de juin indiquent que la situation commence à se stabiliser, les ventes résidentielles ayant augmenté de 3,5 % par rapport à l’an dernier, et de 2,8 % par rapport à mai. Cette reprise est largement attribuable à la baisse des taux hypothécaires et à l’amélioration du sentiment des acheteurs, qui perçoivent un certain apaisement dans les tensions commerciales.
Le maintien des taux aujourd’hui n’améliorera pas davantage les conditions d’achat, mais pourrait inciter certains acheteurs à agir rapidement pour profiter des taux en vigueur tant qu’ils tiennent encore. Étant donné les facteurs économiques qui laissent entrevoir une stagnation, voire une hausse des taux, il est judicieux pour quiconque souhaite obtenir ou renouveler un prêt hypothécaire de bloquer son taux ou d’obtenir une préautorisation complète dès maintenant, afin de garantir l’accès aux taux actuels.
L’incidence sur les produits bancaires et les placements
Les prêts hypothécaires ne sont pas les seuls produits financiers influencés par les décisions de la Banque du Canada. Le maintien du taux aujourd’hui signifie aussi que les taux d’intérêt sur d’autres types de prêts – comme les marges de crédit, les marges de crédit hypothécaire, les prêts personnels et les prêts automobiles – resteront inchangés, puisqu’ils sont également fondés sur le taux préférentiel, et donc sur le taux de financement à un jour.
Le taux préférentiel a également une incidence sur le rendement des produits d’épargne et d’investissement, notamment les comptes d’épargne à intérêt élevé et les certificats de placement garanti (CPG) – ceux-ci demeureront stables pour l’instant, les CPG continuant d’offrir des taux intéressants. Cela en fait un placement « refuge » rare, à un moment où les marchés boursiers et obligataires sont fortement secoués par l’incertitude commerciale qui plane sur notre économie.
Penelope Graham, Directrice des contenus
Penelope Graham a plus de dix ans d'expérience dans le domaine de l'immobilier, des hypothèques et de la finance. Ses commentaires sur le marché du logement sont publiés dans les médias nationaux et locaux.