La Banque du Canada maintient son taux directeur à 2,75 % dans son annonce de juin 2025
Les taux d'intérêt canadiens resteront inchangés, la banque centrale du pays ayant annoncé ce matin qu'elle ne modifiait pas son taux directeur. La Banque du Canada (BdC) a décidé de maintenir son taux cible du financement à un jour (que les prêteurs utilisent pour fixer leurs taux préférentiels et, par extension, leurs taux d'emprunt variables) à 2,75 %, niveau auquel il se maintient depuis le 16 avril. En conséquence, le taux préférentiel du Canada restera à 4,95 %.
Il s'agit du deuxième maintien consécutif des taux par la Banque du Canada, après les sept baisses consécutives qu'elle a opérées entre juin 2024 et mars de cette année. Au total, le taux des prêts à un jour a diminué de 225 points de base, par rapport à son précédent sommet de 5 %.
Dans l'ensemble, le maintien du taux d'aujourd'hui ne surprendra pas les marchés ; les économistes s'attendaient largement à ce que la Banque du Canada maintienne le statu quo, le marché estimant cette probabilité à 75 %. Cependant, la décision de la banque centrale a été difficile à prendre, compte tenu des données économiques mitigées et des répercussions de la question des droits de douane américains.
La Banque se trouve dans une situation délicate, devant à la fois protéger l'économie canadienne du risque croissant de récession et maintenir la croissance de l'inflation dans les limites de son objectif durable de 2 %. Ce dernier objectif s'est avéré particulièrement difficile à atteindre, car les prix ont commencé à augmenter en réponse aux droits de douane.
« L’incertitude entourant les droits de douane américains étant encore élevée, l’économie canadienne s’étant affaiblie, mais pas de façon marquée, et les récentes données sur l’inflation étant légèrement plus fortes que prévu, le Conseil de direction a décidé de maintenir le taux directeur à 2,75 % le temps d’amasser plus d’informations sur la politique commerciale américaine et ses effets », indique le communiqué de presse accompagnant l'annonce des taux de la Banque.
« Nous continuerons d’analyser l’évolution et la force des pressions sur l’inflation – celles à la baisse dues à l’affaiblissement de l’économie et celles à la hausse découlant de la montée des coûts. »
VIDÉO : Annonce de la Banque du Canada du 4 juin 2025
La hausse de l'inflation incite à maintenir les taux inchangés
Si l'indice des prix à la consommation (IPC) d'avril dernier affichait un chiffre global prometteur de 1,7 %, cela s'expliquait en grande partie par la chute des prix de l'essence d'une année sur l'autre, qui masquait les hausses progressives d'autres produits, notamment les denrées alimentaires. En réalité, l'inflation sous-jacente (l'indicateur clé surveillé par la Banque du Canada) a dépassé les 3 %, ce qui a largement scellé la décision de maintenir les taux inchangés aujourd'hui.
Dans le communiqué de presse accompagnant l'annonce des taux, la Banque indique qu'en excluant les taxes, l'inflation a en réalité augmenté de 2,3 %, soit plus que ses prévisions, et souligne la hausse des mesures de base, ainsi que les anticipations des consommateurs quant à une augmentation des prix.
« De récentes enquêtes indiquent que les ménages continuent de s’attendre à ce que les droits de douane fassent monter les prix, et que beaucoup d’entreprises ont l’intention de répercuter sur leurs clients les coûts liés aux hausses de droits de douane. La Banque surveillera ces indicateurs de près afin d’analyser l’évolution des pressions inflationnistes., » indique-t-elle.
De nouvelles baisses des taux d'intérêt sont probables à mesure que l'économie ralentit.
Dans le même temps, des fissures ont commencé à apparaître dans l'économie canadienne ; le dernier rapport sur l'emploi a révélé que le taux de chômage au Canada avait atteint 6,9 % en avril, un niveau jamais vu depuis janvier 2017 en dehors de la pandémie, les pertes d'emplois étant concentrées dans le secteur manufacturier, l'un des plus touchés par les droits de douane. Et si le dernier rapport sur le produit intérieur brut a montré une vigueur surprenante, avec une hausse de 2,2 % au premier trimestre de l'année, cela s'explique en grande partie par un effet d'anticipation sur les exportations, les entreprises cherchant à devancer les droits de douane.
Cette hausse devrait être temporaire, l'économie devant se refroidir rapidement dans les mois à venir ; les consommateurs font déjà preuve de prudence, les dépenses des ménages ayant chuté à seulement 0,3 % au premier trimestre, après une augmentation de 1,2 % au trimestre précédent.
En effet, un nouveau rapport publié par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) tire la sonnette d'alarme, affirmant que les défis commerciaux actuels, associés à l'affaiblissement de la confiance des consommateurs et des entreprises, entraîneront une baisse de la croissance économique mondiale à seulement 2,9 % en 2025 et 2026, contre 3,3 % en 2024. La situation sera particulièrement difficile au Canada, l'OCDE prévoyant une croissance de seulement 1 % cette année et de 1,1 % l'année prochaine, contre 1,5 % l'année dernière.
En conséquence, l'organisation s'attend à ce que la Banque du Canada procède à une nouvelle baisse de 50 points de base d'ici la fin de l'année, ramenant ainsi le taux des prêts à un jour à 2,25 %. « La banque centrale devra trouver un équilibre délicat entre les effets contradictoires des droits de douane sur l'inflation : la pression à la hausse exercée par la hausse des prix à l'importation et la pression à la baisse exercée par la baisse de la demande », indique le rapport.
La Banque du Canada a de nouveau choisi de ne pas divulguer de prévisions officielles pour le PIB dans cette annonce, reconnaissant les bons résultats du deuxième trimestre et les facteurs qui les sous-tendent, ainsi que la baisse de la demande immobilière et le ralentissement du marché du travail, déclarant : « Au deuxième trimestre, l’économie devrait être beaucoup plus faible, en raison du renversement de la forte hausse des exportations et des stocks et du fait que la demande intérieure finale demeure faible. »
Bien sûr, une récession sur le sol canadien n'est qu'une partie des préoccupations de la Banque du Canada ; si l'économie américaine s'effondrait à cause des droits de douane, le trou noir économique qui en résulterait entraînerait le Canada dans sa chute, étant donné que les États-Unis restent le premier partenaire commercial de notre pays. Le même rapport de l'OCDE a attribué aux États-Unis la révision à la baisse la plus sévère, avec un PIB qui devrait passer de 2,8 % en 2024 à 1,6 % cette année et à 1,5 % en 2026.
La Banque du Canada doit également tenir compte de l'orientation donnée par la Réserve fédérale américaine, car s'écarter trop de la politique monétaire américaine exercerait une pression à la hausse sur le dollar canadien et, par extension, sur l'inflation canadienne. Étant donné que la croissance économique américaine reste stable et que les droits de douane sur les importations devraient faire grimper l'inflation américaine, il est peu probable que la banque centrale américaine soit en mesure de réduire ses taux avant au moins 2026.
« Le Conseil procède avec prudence, en portant une attention particulière aux risques et aux incertitudes auxquels l’économie canadienne est confrontée, notamment : dans quelle mesure les droits de douane américains plus élevés font baisser la demande pour les exportations canadiennes; à quel point cela a une incidence sur les investissements des entreprises, l’emploi et les dépenses des ménages; avec quelle ampleur et à quelle vitesse les hausses de coûts sont répercutées sur les prix à la consommation; et comment évoluent les attentes d’inflation. »
Ce que cela signifie pour les taux hypothécaires variables
Comme le taux directeur de la Banque du Canada n'a pas changé, le taux préférentiel (actuellement de 4,95 %) utilisé par les prêteurs à la consommation canadiens restera inchangé. Cela signifie que les taux hypothécaires variables, qui sont fixés en fonction du taux préférentiel majoré ou minoré d'un pourcentage, ne subiront aucune modification de leur taux d'intérêt, du montant de leurs mensualités, du montant des intérêts sur leurs paiements ou du montant de leur dette principale. Le taux hypothécaire variable sur cinq ans le plus bas au Canada restera à 3,95 % dans un avenir prévisible, jusqu'à la prochaine annonce de la Banque du Canada.
Ce que cela signifie pour les taux hypothécaires fixes
Les taux hypothécaires fixes ne sont pas directement affectés par les annonces de taux de la Banque du Canada, mais ils sont certainement influencés par celles-ci. En effet, les prêteurs basent leurs taux hypothécaires fixes sur les prix et les rendements des obligations. Lorsque les rendements obligataires baissent, en particulier ceux qui sont garantis par les gouvernements, cela signifie que les investisseurs ont davantage confiance dans la solvabilité de l'émetteur de ces obligations. Cela permet de réduire la prime de risque sur l'obligation, ce qui signifie qu'elle peut offrir un rendement moindre tout en attirant les investisseurs en raison de la sécurité et de la sûreté qu'elle inspire.
L'inverse se produit lorsque les investisseurs perdent confiance dans la capacité de l'émetteur de l'obligation à verser des rendements : une prime de risque plus élevée est alors nécessaire, ce qui fait augmenter le rendement de l'obligation, mais aussi diminuer sa valeur globale.
Lorsque la prime de risque et les rendements augmentent fortement pour les obligations garanties par l'État, cela indique de manière plus générale que les investisseurs perdent confiance dans l'économie de ce pays. C'est ce qui s'est produit à la mi-avril avec le rendement des bons du Trésor américain à 10 ans : après que le président américain Trump a dévoilé son plan agressif de droits de douane réciproques, les marchés boursiers se sont effondrés et les investisseurs obligataires ont fui les titres de créance garantis par les États-Unis. Les bons du Trésor à 10 ans servant de référence mondiale pour la fixation du prix de la dette, les rendements obligataires canadiens ont suivi le mouvement.
Les rendements sont restés élevés dans les deux pays au cours des semaines qui ont suivi, les investisseurs s'attendant à ce que la volatilité des droits de douane se poursuive et à ce que l'inflation augmente. Le marché a également déjà intégré les nouvelles baisses anticipées de la Banque du Canada et s'attend à une hausse de l'inflation en raison des mesures de relance budgétaire fédérales, qui nécessiteront l'émission de nouvelles obligations d'État. Au moment de la publication, le rendement des bons du Trésor américain à 10 ans se maintient dans la fourchette supérieure de 4,4 %, tandis que le rendement des obligations du gouvernement canadien à 5 ans se situe dans la fourchette de 2,8 %.
Cela a fixé un plancher pour les taux hypothécaires fixes. Bien que les taux restent relativement bas, avec la meilleure option assurée à taux fixe sur cinq ans au Canada à 3,84 %, les banques n'ont aucune marge de manœuvre pour accorder des rabais. Toute nouvelle volatilité des marchés qui ferait grimper les rendements exercerait également une pression à la hausse sur les options hypothécaires à taux fixe.
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Le maintien des taux d'intérêt aujourd'hui prolongera le gel profond du marché immobilier.
L'incertitude persistante entourant les tarifs a eu un effet dissuasif sur le marché immobilier canadien, habituellement très actif au printemps, et le maintien des taux actuels ne contribuera guère à redynamiser les acheteurs. Les dernières données nationales de l'Association canadienne de l'immobilier montrent que les ventes de maisons ont chuté de 9,8 % en avril par rapport à l'année précédente ; les dernières statistiques de mai pour la région du Grand Toronto, publiées ce matin, révèlent une baisse de 13 % des ventes dans la région, soit le mois de mai le plus lent depuis 2002, sans compter les effets de la pandémie en mai 2020.
Cette situation est largement due à la crainte d'une perte d'emploi ou de difficultés financières générales en cas de récession ; rares sont les acheteurs prêts à s'engager dans une entreprise financière importante dans le contexte macroéconomique actuel. L'offre de maisons à vendre a également augmenté de façon constante, ce qui a favorisé les conditions pour les acheteurs sur de nombreux marchés.
Tout cela a commencé à faire baisser les prix des logements : la moyenne nationale a baissé de 3,9 % par rapport à l'année précédente, pour s'établir à 679 866 dollars, et de 4 % dans la région du Grand Toronto, pour s'établir à 1,1 million de dollars.
Tant que les craintes de récession ne se dissiperont pas, il est peu probable que les acheteurs reviennent en masse sur le marché, même si les taux hypothécaires relativement bas et la baisse des prix des logements améliorent l'accessibilité.
L'impact sur les produits bancaires et les investissements
Le maintien du taux directeur de la Banque du Canada a des répercussions au-delà du marché hypothécaire. À la suite du maintien du taux directeur annoncé aujourd'hui, le taux de rendement restera inchangé pour les produits tels que les prêts personnels, les prêts automobiles et les marges de crédit, qui sont également des produits à taux variable et basés sur le taux directeur de la Banque du Canada.
C'est une bonne nouvelle pour les épargnants qui ont des produits bancaires basés sur le taux préférentiel, comme les comptes d'épargne à taux d'intérêt élevé et les certificats de placement garanti (CPG), car leur taux de rendement restera stable.
Les CPG sont toujours offerts à des taux concurrentiels et demeurent un placement « refuge » solide dans un contexte d'incertitude tarifaire et de bouleversements sur les marchés.
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Penelope Graham, Directrice des contenus
Penelope Graham a plus de dix ans d'expérience dans le domaine de l'immobilier, des hypothèques et de la finance. Ses commentaires sur le marché du logement sont publiés dans les médias nationaux et locaux.